Réforme injuste, inégalitaire, inéquitable, inutile, inefficace dans le temps ... qui ne règlera rien ...
Madame la députée,
Monsieur le député,
Après deux premières journées de mobilisation intersyndicale d’ampleur, après l’intervention de madame Borne sur France 2 jeudi 2 février et à la veille de nouveaux appels à la grève et aux mobilisations contre le projet de loi des retraites, le Sgen-CFDT Nord Pas-de-Calais se permet de vous interpeler afin de vous expliquer pourquoi nous nous opposons à la réforme des retraites proposée par le gouvernement.
Tout d’abord, cette réforme est injuste. Le report de l’âge légal de la retraite à 64 ans touche davantage certains travailleur.ses que d’autres : celles et ceux qui sont proches de la retraite et surtout celles et ceux qui ont commencé à travailler avant 21 ou 22 ans. Or ces travailleur.ses sont aussi souvent celles et ceux qui occupent les emplois les moins rémunérés, les plus éreintants et dont l’espérance de vie en bonne santé est la plus faible. Ce sont aussi celles et ceux qui ont pour beaucoup permis à notre société de tenir au moment de la pandémie de Covid.
Ensuite, cette réforme est inégalitaire, contrairement aux dires du gouvernement. Elle ne touchera pas de la même façon les différentes classes sociales. Elle ne touchera pas non plus de la même façon les femmes et les hommes. On estime par exemple que les femmes de la génération 1972 devront en moyenne travailler 9 mois de plus contre 5 mois pour les hommes de la même génération.
Cette réforme est également inéquitable. Telle qu’elle est conçue, la réforme fait peser l’intégralité de l’effort sur les actifs.ves et notamment sur une partie de ceux-ci. Les entreprises, les retraité.es aisé.es ou d’autres ne sont pas mis à contribution. Cette inégalité ne peut pas être socialement acceptable.
Il est bon de rappeler que le système de retraites par répartition français n’est à ce stade pas menacé ! C’est ce que nous dit le Conseil d’Orientation des Retraites (COR). Le déficit projeté de 12 milliards d’euros pour 2027 ne représente en réalité que 3 % des dépenses de retraites par an (s’élevant à 324 milliards). Selon le COR, celui-ci reste « maitrise » et sur les 4 scénarios prévus pour les années suivantes, 3 prédisent que ce déficit va se résorber. L’effort demandé par le gouvernement est ainsi non seulement injuste mais aussi inutile.
Cette réforme se révélera inefficace dans le temps… Repousser l’âge légal peut permettre de faire rentrer davantage de cotisations et de payer moins de pensions… en théorie ! Car en pratique seuls 56% des Français de 55 à 64 ans sont en emploi. Le chômage massif des séniors est un coût important pour l’assurance chômage (et risque donc de s’aggraver avec la réforme) et un manque pour les caisses de retraite. Repousser l’âge légal sans traiter ce sujet, c’est risquer simplement de transférer le déficit du système de retraites à l’assurance chômage. A l’opposé, trouver de vraies solutions pour améliorer l’emploi des séniors permettrait de combler largement le léger déficit actuel. Ça tombe bien, la CFDT a des propositions en ce sens.
Enfin, cette réforme ne va rien régler… La CFDT est partisane depuis de longues années d’une vraie réforme des retraites. Eh oui ! Car notre système actuel est injuste. Il est injuste pour les femmes dont les pensions sont en moyenne 41% inférieures à celles des hommes. Il est injuste pour tous les personnels polypensionnés (qui ont cotisé à plusieurs caisses de retraite différentes) car les règles de calcul leur sont très fortement défavorables. Ces polypensionné.es représentent plus d’un tiers de la population ! Malgré de timides avancées sur le montant des pensions les plus faibles, la réforme proposée ne règle rien de ces soucis structurels de notre système de retraite. Pire, elle renforce encore certaines de ces injustices.
Pour terminer, nous vous invitons à voter pour l’amendement n°19594 concernant l’article 7 du PLFRSS pour 2023 (n°760) déposé ce jeudi 2 février par bon nombre de vos collègues. Cet amendement permettra de rétablir l’équité entre les seul·es enseignant·es du 1er degré et TOUS les autres personnels de l’Éducation nationale. En effet, actuellement la mise à la retraite des personnels enseignants du 1er degré ne peut légalement intervenir en cours d’année scolaire (article L. 921-4 du code de l’éducation). La loi impose donc aux professeurs des écoles un départ à la retraite au 31 août. Ce sont les seuls actifs et surtout actives à ne pas pouvoir choisir leur date de départ en retraite.
Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de nos salutations distinguées.