Comité technique ministériel Jeunesse et Sports du 14 octobre 2020 : déclaration liminaire

Déclaration préalable du Sgen-CFDT : Tutelle de l'Éducation nationale, budget 2021, politiques sportives conduites par l'État, transfert des personnels, devenir des CTS, place de l'ANS, avenir des établissements du ministère des sports...

CTM Jeunesse et Sports du 14 octobre 2020Comité technique ministériel Jeunesse et Sports du 14 octobre 2020 : déclaration liminaire
Déclaration liminaire du Sgen-CFDT

 

Madame la Ministre déléguée, Madame la Secrétaire d’État, au nom du Sgen-CFDT nous saluons votre présence à l’occasion de la réunion de ce CTM.

Nous n’avions pas eu l’occasion de le faire puisque le CTM du 10 juillet n’avait pas pu se tenir faute de quorum et n’avait pas été reconvoqué dans les conditions prévues par le règlement, pour des raisons qui nous échappent encore aujourd’hui.

Cependant la vérité nous oblige à dire que nous apprécions différemment vos nominations.

Autant la vôtre, Madame la Secrétaire d’État, peut nous satisfaire, autant la vôtre, Madame la Ministre déléguée, a suscité notre inquiétude.
Inquiétude partagée par beaucoup, je cite à cet égard un rapport récent des sénateurs LOZACH et FOUCHE, qui affirment leur attachement à l’existence d’un ministère de plein exercice à un moment où, je cite «le rattachement opéré auprès de l’Éducation nationale fait craindre une disparition pure et simple d’un département ministériel pérenne et autonome ».

C’est ce sur quoi le Sgen-CFDT a constamment alerté depuis des mois.

Dans un contexte fait d’incertitudes, la mise sous tutelle du ministère des sports charrie son lot d’inquiétudes supplémentaires…

Dans un contexte où, aux incertitudes créées par les effets conjugués de réformes mal pensées, réforme de la gouvernance du sport, réforme de l’OTE avec en parallèle un transfert de la gestion de tous les personnels JS, réforme de la fonction publique, s’ajoutent les incertitudes liées à la crise sanitaire, et à ses prolongements économiques et sociaux, cette mise sous tutelle du ministère des sports charrie son lot d’inquiétudes supplémentaires.

La présentation des grandes lignes du budget 2021 vient confirmer nos craintes.

Il est affiché un budget en hausse de 710 à 802 millions. Mais cette hausse est due au bond que font les crédits pour la SOLIDEO, qui passent de de 129 à 225 millions, et pour l’ANS, qui passent de 284 à 365 millions en incluant les crédits du plan de relance. Les crédits pour les actions de l’administration centrale, censer couvrir la prise en charge des CTS, la subvention pour les établissements publics et le budget pour la Direction des sports, baissent de 297 à 212 millions.

Dans ce contexte nos points de vigilance deviennent des alertes…

Première alerte : les politiques sportives conduites par l’État ne peuvent se limiter aux aspects relatifs à l’éducation, et encore moins ne concerner que les publics d’âge scolaire.

Il faudra nous démontrer comment d’autres enjeux aussi essentiels de politiques sportives conduites par l’État, les lourds enjeux de santé publique des politiques orientées vers les publics les plus éloignés de la pratique, dont les seniors, les enjeux des politiques sportives en faveur de la cohésion sociale, de l’accès à l’emploi, qui justifieraient de conserver un ministère de plein exercice, seront pris en considération au sein de l’EN.

Il faudra aussi nous démontrer comment l’action de votre ministère délégué, dans le cadre de la continuité éducative annoncée, pourra se conjuguer avec celle menée au sein de l’éducation nationale par les enseignants d’éducation physique.

Notre 2ème alerte concerne évidemment les personnels embarqués dans ce transfert à l’EN, pas seulement les personnels des corps spécifiques JS des services déconcentrés dans le cadre d’OTE, nous tenons à le rappeler.

Pour tous ces personnels, notamment les personnels administratifs et techniques, y compris ceux des établissements du ministère des sports, passer d’une gestion harmonisée à l’échelle nationale à une gestion déconcentrée à l’échelle des rectorats, à une gestion de masse qui plus est, tout cela en quelques semaines, et se voir imposer pour ceux de ces personnels appartenant actuellement à des corps des ministères sociaux, un détachement dans des conditions incertaines, il y a de quoi être inquiet en effet.

Je vous renvoie à l’enquête effectifs-activité 2019 des établissements : il y a en établissements plus d’agents des affaires sociales, que d’agents des corps du MEN et de l’ESR.

Les premiers GT programmés avec la DGRH, qui ont porté sur des questions exclusivement macro ou statutaires, ne nous ont pas permis pas, loin s’en faut, d’apporter des réponses à toutes les questions que nous posent ces personnels, notamment sur la question indemnitaire à moyen terme. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé un comité de suivi du transfert.

Il y a urgence, au risque sinon de voir s’amplifier la fuite des personnels vers d’autres horizons. Déjà nous sommes sollicités pour accompagner des collègues dans le cadre de leurs projets de demande de rupture conventionnelle.

3ème alerte : le devenir des CTS.

L’annonce du renoncement officiel à leur projet de transfert par voie de détachement aux fédérations sportives n’a fait que confirmer ce qui était déjà acquis. Au delà de leur affectation à court terme en DRAJES, le questionnement reste entier sur la modernisation de leur gestion dont il est question.

Nous rappelons notre position constante : pour le Sgen-CFDT, les CTS ne doivent pas être considérés comme formant un ensemble homogène. Il y a une très grande majorité des CTS, hormis ceux qui sont sur la très haute performance, qui ont selon nous vocation à rejoindre les DRAJES, pour des missions repensées autour de l’accompagnement des fédérations qui en ont le plus besoin, et nous disons bien des fédérations, parce que nous pensons qu’il faut faire évoluer leur position d’agent placé auprès d’une seule fédération, qui génère de nombreux problèmes de double ou triple autorité, et les expose à des risques de conflits de loyauté, de conflits d’intérêt, problématiques vu leur rôle essentiel dans la prévention du dopage ou des violences sexuelles et sexistes.

Il faut garantir leur indépendance vis à vis de fédérations et qu’ils puissent servir les priorités définies par le ministère, par l’Etat en matière de développement des pratiques sportives, et non les priorités du développement fédéral, qui ne sont pas nécessairement les mêmes.

4ème alerte : la place de l’ANS, qui tend à s’affranchir de son rôle d’opérateur du ministère et dont les choix stratégiques tendent manifestement à se substituer à ceux de l’Etat.

A ce sujet nous dénonçons le projet ultra-élististe de soutien à la très haute performance qui vient d’être présenté par son manager général, car il remet clairement en cause la spécificité du modèle français autour de l’accompagnement du double projet des SHN. Nous sommes également préoccupés par la gouvernance de cette agence qui ne laisse qu’un strapontin aux représentants des salariés.

La 5e alerte porte sur les établissements du ministère des sports.

C’est l’angle mort de toutes les discussions avec la DGRH, alors que leurs personnels vont aussi être impactés par le transfert de gestion à l’éducation nationale. C’est l’angle mort du dialogue social au ministère des sports en général. Ils sont au cœur de nombreuses interrogations, du fait leur modèle économique fragile, encore plus depuis la crise sanitaire. Leur place dans la nouvelle gouvernance du sport est incertaine, d’autres projets qui les concernent auront des impacts évidents sur leurs personnels, comme un projet de mutualisation des CREPS qui avance sans la moindre concertation, et peut-être, si l’on en croit les rumeurs, une nouvelle étape de leur décentralisation. Et pourtant, silence.

Nous avons demandé un GT dédié qui ne s’est toujours pas réuni.

Nous rappelons notre mandat, qui fait sens dans le contexte, de conforter ce réseau de petits établissements autour de son cœur de métier, la préparation et la formation des SHN, mais aussi la formation aux métiers du sport et de l’animation, la recherche et la documentation, qui sont les missions classiques d’un établissement d’enseignement supérieur. Comment ? En dotant ce réseau d’un statut de grand établissement avec des centres régionaux, d’une gouvernance démocratique et d’une instance de dialogue social.

Le ministère doit conserver ce levier historique de son action et non le brader en pièces détachées aux régions.

Alerte enfin sur les missions jeunesse, éducation populaire et vie associative.

La pérénnisation du plan colo apprenantes sanctuarise une mission supplémentaire dans les services. On souhaite également que les crédits FDVA augmentent. On espère toujours que le compte d’engagement citoyen se déploie.
On constate que la réserve civique recommence à mobiliser.

Si l’on peut se féliciter de voir ces sujets à l’ordre du jour, force est de constater que dans ce domaine le ministère ne semble pas être en capacité de transformer ses attentes en réalités, faute de bras localement pour les porter.

Et pour conclure nous avons les plus grandes réserves concernant la pérennité de la mission vie associative dans le cadre du transfert. Quel sort pour les greffes ? Quel maintien de l’expertise pour les bureaux des associations ? Comme pour le sport, quelle capacité de l’éducation nationale à accueillir et développer une politique cohérente sur la vie associative en son sein ?

Je vous remercie de votre écoute.