Un certain nombre d’enseignants, par leur adhésion à la démarche du collectif « stylos rouges », manifestent qu’ils partagent les constats posés par plusieurs organisations syndicales représentatives dont le Sgen-CFDT Nord Pas-de-Calais. Voici notre point de vue sur ce mouvement.
Depuis de nombreuses années, le Sgen-CFDT porte un certain nombre de revendications aujourd’hui très justement reprises par le mouvement des stylos rouges. Le pouvoir d’achat, les conditions de travail, le droit à la mobilité sont des sujets sur lesquels nous partageons le constat quant à l’urgence d’agir. Par contre, leurs revendications s’éloignent des nôtres lorsqu’il s’agit de concilier équité et réalisme.
Rémunération
Ainsi, par exemple, les questions de rémunération ne peuvent pas être traitées uniquement via le point d’indice. L’augmentation de ce dernier est en effet plus favorable aux personnels qui ont déjà les plus fortes rémunérations de l’Éducation Nationale.
Il nous semble nécessaire de considérer aussi les importantes inégalités de traitement au sein même de l’Éducation Nationale, entre les différents corps (parfois pour des missions pourtant similaires), entre les débuts et les fins de carrière (souvent du simple au double) etc. Pour le Sgen-CFDT Nord Pas-de-Calais, il est essentiel que les revendications salariales se fassent d’abord en faveur des personnels les plus défavorisés.
Il nous semble également important de rappeler qu’en matière de rémunération, c’est au sein du ministère de la fonction publique que les décisions sont prises et que les revendication doivent être portés. Seconde organisation syndicale de la fonction publique, la CFDT est un interlocuteur opiniâtre sur toutes ces questions.
Quelques-unes des actions que nous avons menées ces dernières années
● Agents contractuels, pétition – revendications
● Pétition santé
● Parlons métiers
● Santé, sécurité, conditions de travail
… lire régulièrement nos différents sites internet !
PPCR
D’autres revendications des stylos rouges nous semblent plus problématiques ou trop floues encore à ce stade. Il en va ainsi de la renégociation de PPCR évoquée. Les défauts de PPCR sont nombreux. Mais PPCR ce sont aussi 5 milliards d’euros pour les agents, la création de la classe exceptionnelle et la fin d’un système d’évaluation qui désavantageait clairement les femmes et les enseignant.e.s de certaines disciplines. Si nous continuons à demander des améliorations, c’est une signature que nous ne regrettons pas.
Ne pas se contenter de revendiquer un retour à l’ancien temps
Sur d’autres sujets, il nous semble qu’il ne peut pas être possible de revendiquer un statu-quo.
Nous sommes ainsi très attachés à un système de retraite par répartition. Mais nous pensons aussi que le système actuel est très injuste et parfois trop complexe en particulier pour les femmes et les polypensionnés. C’est pourquoi, pour nous, une réforme est nécessaire et que nous attendrons, comme toujours, de voir les propositions précises qui seront faites avant de revendiquer un retrait (lire le Manifeste pour les retraites de la CFDT)
Réforme des lycées
Il en va un peu de même pour la réforme des lycées. Nous dénonçons depuis 1 an des réformes bâclées et insatisfaisantes. Nous avons voté contre la réforme du lycée au CSE. Néanmoins, nous savons aussi qu’une réforme du lycée est nécessaire, entre autres car le système de filières actuel est profondément injuste socialement. C’est pourquoi nous demandons un report pour une renégociation.
Revendiquer uniquement le maintien du système existant et se limiter à demander des conditions de travail meilleures n’est absolument pas satisfaisant. Nous ne souhaitons pas tomber dans la nostalgie d’un ancien temps où les enseignant.e.s auraient été unanimement respecté.e.s. Cet âge d’or n’a jamais réellement existé. La réalité de l’école française avant le milieu des années 1970, c’est aussi celle d’un système dans lequel les classes sociales défavorisées n’avaient quasiment pas accès à l’enseignement secondaire. C’était l’école du tri social !
L’école française reproduit en son sein, plus que dans d’autres pays, les inégalités sociales. Ce simple constat doit nous amener à penser que des changements majeurs sont nécessaires. Mais des changements qui associent pleinement les personnels et non des changements décidés d’en haut avec des changements de cap brutaux tous les 2-3 ans. Des changements, aussi, qui permettent de donner réellement plus à ceux qui ont le moins par le biais entre autres de l’Éducation prioritaire dont le Sgen-CFDT fut l’initiateur au début des années 1980.
Permettre aux personnels de participer aux choix qui sont faits pour nos élèves et notre société
Nous sommes aussi attaché.e.s à une approche générale des problématiques de l’Éducation Nationale. Celle-ci ne peut selon nous être vue uniquement à travers le prisme des enseignant.e.s et c’est en faisant appel aux ressources de tous les personnels (enseignant.e.s, administratifs, personnels de direction et d’encadrement, personnels d’orientation, personnels de santé et de service social, AESH …) et en croisant les regards que nous pourrons faire progresser notre École de la manière la plus pertinente. C’est une approche que nous retrouvons peu dans le manifeste des stylos rouges.
Enfin, il est primordial que les personnels de l’Éducation Nationale revendiquent plus d’autonomie locale et de responsabilités nationales pour participer pleinement, via leur expertise réelle, aux choix qui sont faits pour les élèves et la société. Ne nous contentons pas d’être sujets, revendiquons pleinement notre rôle d’acteurs.
Dans un contexte où moins de 50% des agents de l’éducation nationale votent aux élections professionnelles, c’est une bonne nouvelle de voir que les personnels se mobilisent. Nous continuerons notre action au quotidien au service de tous les personnels de l’Éducation Nationale et de l’Enseignement Supérieur pour leur défense et l’amélioration de leurs conditions de travail.