Groupes de niveau en collège : le Sgen-CFDT engage un recours devant le Conseil d’État pour faire annuler l’arrêté
De par les valeurs qu’il porte, le Sgen-CFDT, s’est dit, dès le départ, profondément opposé au principe des groupes de niveau tels que le Ministre de l’Education Gabriel Attal, devenu Premier Ministre, les entend. Dès lors, de multiples moyens d’action syndicale ont été déployés à tous les niveaux. Le recours juridique est aussi un levier d’action.
Quels arguments juridiques ?
L’autonomie des établissements est définie par le code d’éducation. Or l’arrêté du « choc des savoirs » la contredit.
En effet, le code de l’éducation, dans sa partie réglementaire (article R421-2), écrit que les collèges « disposent, en matière pédagogique et éducative, d’une autonomie qui porte sur l’organisation de l’établissement en classes et en groupes d’élèves ainsi que les modalités de répartition des élèves […] ».
De plus, si ce même code prescrit l’usage de « pratiques pédagogiques diversifiées et différenciées qui visent à permettre à tous les élèves de progresser dans leurs apprentissages » (article D332-5), le dernier alinéa du même article affirme clairement que « La mise en œuvre des modalités de différenciation relève de l’autonomie des établissements. »
Or, non seulement l’arrêté du 15 mars 2024 mettant en œuvre le prétendu « choc des savoirs » impose à tous les collèges la répartition des élèves en groupes, dont au moins un groupe des élèves de niveau le plus faible, mais il force leur application à la totalité des horaires de français et mathématiques, sauf périodes de regroupement accordées uniquement par dérogation.
Il supprime donc clairement l’autonomie des établissements en la matière et la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse a d’ailleurs rappelé publiquement que l’application de ces mesures « n’était pas optionnelle. »
Les articles mentionnés ci-dessus du code de l’éducation on valeur de décret (voire, pour les articles en R, de décret en conseil d’État). Or, dans la hiérarchie des normes, un décret est juridiquement supérieur à un arrêté ; le second ne peut pas contredire le premier sans être frappé d’illégalité.
Nous demandons donc à la justice administrative de constater que l’arrêté du 15 mars 2024 est illégal et doit par conséquent être annulé. S’agissant d’un arrêté ministériel, le Conseil d’État, qui est la plus haute juridiction administrative du pays, est juge en première et dernière instance.
La procédure en cours
Notre avocat a déposé au nom de la fédération des Sgen-CFDT, le 18 avril 2024, une requête sommaire au Conseil d’État, demandant l’annulation de l’arrêté du 15 mars 2024 et notamment de son article 4, portant sur les groupes. Cette première requête sera complétée d’un mémoire complémentaire détaillant l’ensemble des moyens d’annulation que nous soulevons.
La fédération va de plus, dans les jours prochains, déposer une demande de référé-suspension, afin que l’application du texte soit suspendue dans l’attente d’un jugement sur la requête au fond.
Nous restons opposés aux groupes de niveau
Le Sgen-CFDT refuse les groupes de niveau voulus par le gouvernement. Certes, travailler en groupes de besoins quelques heures par semaines, en accompagnement personnalisé, est un dispositif efficace. Mais ce n’est pas du tout la nature du dispositif que le gouvernement veut imposer, contre l’avis de tous les experts et en contradiction avec les résultats de la recherche.
Les groupes du « choc des savoirs », organisés sur tout l’horaire de français et de mathématiques, et sur toute la scolarité au collège, sont dans les faits des groupes de niveaux, destinés à séparer les élèves de manière durable. Les études et l’expérience montrent que l’efficacité pour réduire les difficultés des élève disparait et s’inverse lorsqu’il est appliqué ainsi.
En réalité, on a là un instrument de maintien des inégalités scolaires, voire de ségrégation sociale.
Cela heurte nos valeurs, cela nuit à l’efficacité pédagogique, cela va à l’encontre de de l’intérêt de la société comme de celui des élèves.